À Edmonton, le camp d’entraînement prend des airs de provocation pour Montréal. Matthew Savoie patine désormais sur un trio avec Connor McDavid et Leon Draisaitl.
Une ascension fulgurante qui fait briller les yeux des partisans des Oilers, mais qui laisse un goût amer au Québec : le Canadien a flirté avec la possibilité de mettre la main sur Savoie… mais n’a jamais eu les cartes pour conclure.
Car les Sabres de Buffalo avaient une idée claire. Kevyn Adams cherchait un attaquant de puissance, fiable défensivement, capable de jouer des minutes difficiles. Le profil rare du « plombier deluxe » qui transforme une équipe talentueuse en machine de séries.
Ryan McLeod, avec sa taille de 6 pieds 3, sa rapidité et son salaire abordable, représentait l’idéal. Edmonton, en offrant McLeod, a donné exactement ce que Buffalo exigeait. Montréal, lui, n’avait pas cette pièce dans son arsenal.
Kent Hughes a tenté. Sportsnet l’a confirmé : le DG du Canadien a cogné à la porte. Mais son offre ne pouvait pas rivaliser. Non seulement il n’avait pas l’équivalent de McLeod sous la main, mais en plus, Buffalo n’avait aucun intérêt à envoyer un joyau comme Savoie chez un rival direct de l’Association de l’Est.
Hughes pouvait bien offrir Justin Barron, Jordan Harris et un choix de première ronde, les Sabres cherchaient autre chose.
Résultat : Edmonton a obtenu Savoie pour une fraction de sa valeur. Et quelques semaines plus tard, les Oilers ont sauté sur une autre fissure.
À Tampa, Isaac Howard, 31e choix du même repêchage, refusait de signer. BriseBois lui-même avait dit : « Je serais surpris qu’on arrive à le signer. » Plutôt que de le perdre pour rien, le Lightning l’a cédé. Les Oilers ont encore frappé au bon moment.
Deux coups de filet qui transforment Edmonton en club non seulement prêt à gagner maintenant, mais aussi armé pour l’avenir.
À Montréal, la comparaison est brutale. Hughes n’est pas resté les bras croisés. Il a payé cher pour bâtir son équipe. Alex Newhook lui a coûté un premier et un deuxième choix. Kirby Dach lui a coûté Romanov. Zachary Bolduc lui a coûté Logan Mailloux, un droitier qui avait le potentiel de devenir un défenseur de premier plan.
Hughes a bougé, parfois agressivement. Mais chaque fois, le prix a été élevé. Et chaque fois, le rendement tarde à justifier l’investissement.
Pendant que McDavid glisse des rondelles à Savoie, pendant que Howard se prépare à lancer ses premières bombes dans l’uniforme orange et bleu, le Canadien se demande encore qui sera son deuxième centre. Dach? Newhook? Bolduc? Peut-être Kapanen ou encore Roy? Rien n’est clair. Rien n’est assuré.
C’est là que le contraste fait mal. Edmonton a trouvé deux jeunes pour « presque rien ». Montréal a payé gros pour des joueurs qui n’ont pas encore livré la marchandise.
Soyons justes : ce n’est pas qu’Hughes a manqué de flair. Il a tenté Savoie. Il a exploré McGroarty. Mais chaque fois, le contexte jouait contre lui. Buffalo voulait un gros centre de soutien immédiatement. Hughes n’en avait pas. Tampa voulait éviter de perdre Howard pour zéro, et Edmonton avait les bons actifs au bon moment. Montréal, en plus, devait composer avec une réalité géographique : les Sabres et le CH sont rivaux directs. Le prix pour transiger dans la même association est toujours plus élevé.
Ça ne change rien à la perception. Dans les estrades, les partisans voient Savoie patiner avec McDavid et Draisaitl. Ils lisent que Howard arrive pour compléter une formation aspirante au grand honneurs. Et ils se demandent pourquoi, une fois de plus, c’est ailleurs que ça se passe.
C’est une histoire de contexte, oui. Mais c’est aussi une histoire d’image. Les Oilers profitent de fissures et bâtissent une relève explosive autour de McDavid. Le Canadien, lui, continue de courir après la pièce manquante, quitte à surpayer.
À Buffalo, on a sacrifié un espoir vedette pour McLeod, parce que la structure l’exigeait. À Tampa, on a lâché un premier choix pour éviter de tout perdre dans un an. À Edmonton, on a sauté sur les opportunités. À Montréal, on a regardé, tenté, échoué.
Au final, l’image demeure : Matthew Savoie, aux côtés de deux des meilleurs joueurs. Isaac Howard, prêt à s’imposer à l’aile gauche. Et Kent Hughes, toujours à la recherche du deuxième centre qui échappe à ses doigts depuis trois ans.
Le constat est cruel. Pas parce qu’Hughes dort au gaz. Pas parce qu’il manque de flair.
Mais parce qu’à chaque fois, ce sont les autres qui profitent des cadeaux.
Et qu’à Montréal, on doit encore se contenter des restes.