Frissons à New York: Mathieu Darche perd patience

Frissons à New York: Mathieu Darche perd patience

Par David Garel le 2025-09-06

C’est une déclaration qui passera à l'histoire à Long Island... et à Montréal...

Une sortie rare. Une entrevue calculée, mais cinglante. Mathieu Darche en avait gros sur le cœur. Et c’est auprès de Pierre LeBrun, dans The Athletic, qu’il a décidé de faire tomber le masque.

Depuis l’échange de Noah Dobson au Canadien de Montréal, le 27 juin dernier, Darche est dans la ligne de mire.

Sur les réseaux sociaux, dans les coulisses de la LNH, dans les chroniques de fin de soirée et les tribunes téléphoniques de Long Island, on entend la même rengaine : il s’est fait avoir. 

Il a cédé un défenseur numéro un pour un prospect offensif de bas-étage (Emil Heineman) et deux choix de première ronde qui ne joueront pas avant des lunes. Il a agi en soumis. Il s’est couché devant Patrick Roy.

Assez. C’est le mot qui résume l’état d’esprit de Darche :

« J’en avais assez d’entendre toutes sortes de théories. »

Et c’est maintenant clair. Il n’a pas échangé Noah Dobson à cause de Patrick Roy. Il l’a échangé parce qu’il n’a jamais été capable de s’entendre sur un nouveau contrat avec l’agent du joueur, Judd Moldaver.

« Je voulais garder le joueur, mais au final, on n’a pas réussi à se mettre d’accord sur un contrat. »

Aucune animosité, mais une impasse... de "cash"...

Darche insiste : il n’y a jamais eu de chicane avec Dobson ou son entourage. Pas de colère. Pas de trahison. Juste une réalité froide.

« Les gens pensent toujours que lorsqu’un joueur est échangé parce qu’on ne peut pas s’entendre sur un contrat, c’est parce qu’il y a eu un conflit. Ce n’est pas le cas ici. Il n’y a jamais eu d’animosité. »

D’un côté, Darche avait sa limite. De l’autre, Judd Moldaver visait plus haut.

« Moi, j’avais une valeur en tête, un seuil à ne pas dépasser. Son agent voyait autre chose. Alors plutôt que de s’obstiner, on a travaillé ensemble pour lui trouver un endroit où il pourrait obtenir ce qu’il voulait. »

Noah Dobson a signé un contrat de 8 ans à 9,5 millions $ par saison avec le Canadien. Un montant que Darche refusait catégoriquement de verser.

Pourquoi pas une année de plus?

Mais une question demeure : pourquoi ne pas avoir attendu? Pourquoi ne pas avoir simplement gardé Dobson pour sa dernière année de contrat et tenté un dernier coup de dés?

Darche ne voulait pas jouer avec le feu.

« Au lieu de le perdre gratuitement dans 12 mois comme joueur autonome sans compensation, j’ai choisi de maximiser sa valeur maintenant. »

Et il ne s’en cache pas : il est content du résultat.

« Je suis très satisfait de ce qu’on a obtenu. Les deux gars qu’on a repêchés avec ces choix (Kashawn Aitcheson et Viktor Eklund), on ne pensait même pas qu’ils allaient être encore disponibles à nos rangs. »

Quant à Emil Heineman? Darche l’adore.

« C’est un gars qui peut nous aider dès maintenant. Et moi, je ne suis pas ici pour rebâtir. »

C’est un autre message important que Darche a voulu marteler : il refuse de reconstruire. Il a pris le pouls de son vestiaire dès la première semaine.

« J’ai appelé tous les joueurs. Je leur ai dit clairement : on ne va pas tout raser. L’an dernier, cette équipe a été minée par les blessures et des unités spéciales dysfonctionnelles. Mais elle a le potentiel pour faire les séries. »

Darche croit à la philosophie du retool. Du réalignement rapide. Pas du démantèlement total.

« Regardez les Capitals. Ils ont réussi leur virage sans tout casser. C’est ce que je veux faire. »

Dobson ne cadrait pas dans cette optique. Pas à ce prix.

Et pour ceux qui pensent que Patrick Roy a dicté la transaction? Darche les invite à revoir leur copie.

« Le jour où j’ai été nommé directeur général, c’est là que j’ai eu son numéro pour la première fois. Deux jours plus tard, j’ai pris l’avion pour Montréal et on a passé cinq heures ensemble. On a cliqué immédiatement. »

Et les rumeurs selon lesquelles Roy aurait voulu se débarrasser de Dobson?

« Les gens disent que Patrick a un ego. C’est faux. Il est passionné, il veut gagner. Mais il est très humble. J’aime travailler avec lui. C’est très collaboratif. »

Échanger un défenseur droitier de 25 ans, avec deux saisons de plus de 50 points sous la ceinture? Un geste rare. Très rare.

Mais Darche a assumé. Même s’il venait d’arriver en poste. Même si c’était sa toute première transaction.

« C’était gros pour commencer, mais je voulais poser un geste. Je voulais faire avancer l’équipe. »

Et le moment n’a pas été choisi au hasard : le repêchage approchait. L’ouverture du marché des joueurs autonomes aussi. Darche voulait frapper vite.

« J’ai appris ça de Julien BriseBois : enlève l’émotion de l’équation. »

Et c’est ce qu’il a fait. Froidement. Stratégiquement.

La pression… il adore ça...

Mais attention : ce n’est pas un DG stressé ou acculé qui a parlé à Pierre LeBrun.

C’est un homme heureux, énergique, et  surtout préparé.

« J’ai aimé chaque minute. Oui, c’était beaucoup, mais j’aime le rythme. Peut-être que je suis hyperactif, mais j’aime ça quand ça bouge. »

Et il a une passion évidente pour tous les aspects du poste : les appels avec les agents, les négociations, les échanges.

« Avant, je donnais mon opinion. Maintenant, c’est moi qui décide. J’adore ça. »

Il faut dire que Darche n’est pas arrivé les mains vides. Six ans à Tampa Bay comme bras droit de BriseBois, ça forge un homme.

« Julien m’a tout appris. Il m’a donné accès à tous les départements. »

Mais Darche tient à préciser : il n’est pas une copie carbone.

« Quelqu’un m’a demandé si les Islanders avaient embauché BriseBois 2.0. La réponse est non. J’ai appris de lui, oui, mais j’ai ma propre personnalité. »

Un DG humain, collaboratif, moderne... tout le contraire de Lou Lamoriello...

Son style? Accessible. Ouvert. Communicatif.

« Je n’aime pas quand quelqu’un me dit : je travaille pour toi. Non. On travaille ensemble. »

Il veut des conversations franches avec ses joueurs. Des liens solides avec ses entraîneurs. Un dialogue fluide avec ses collaborateurs.

Et il se sert même de ses années dans le monde corporatif (Delmar International) pour structurer son approche.

« J’ai dirigé une équipe de 30 personnes à travers le monde. J’ai appris à bâtir une culture. »

Aujourd’hui, il applique ça à la direction des Islanders. Il renforce le département d’analytique. Il restructure la direction hockey. Il imprime sa marque.

Et Noah Dobson, dans tout ça?

Dobson, lui, semble heureux à Montréal. Il a obtenu son contrat. Il jouera devant famille et amis. Il fait déjà bonne figure à Brossard.

Mais Darche n’a aucun regret.

« Je suis heureux de la façon dont ça s’est déroulé. Tout le monde y trouve son compte. »

Et ceux qui parlent de sabotage? D’un complot de Patrick Roy pour chasser le joueur? Darche les invite à se calmer.

« Il faut arrêter de tout ramener à Roy. On a pris une décision d’affaires. Point final. »

Mathieu Darche vient de signer un geste fort. Pas juste un échange de joueur. Pas juste une sortie médiatique.

Un message.

Un avertissement.

Il ne se laissera pas marcher sur les pieds.

Il ne sera pas le pantin de Patrick Roy.

Il ne sera pas celui qui se cache.

Il est le DG des Islanders de New York. Et s’il faut faire une transaction impopulaire pour faire avancer l’organisation, il le fera. Froidement. Stratégiquement. Sans émotion.

« Ce n’est pas personnel. C’est du business. »

Mais à ceux qui doutent encore de ses intentions, de sa valeur ou de sa colonne vertébrale, Darche a laissé un message clair :

Il est tanné. Et il n’a plus rien à prouver.