Pauvre Nick Suzuki.
Lui qui croyait se battre uniquement contre Anthony Cirelli pour une place comme quatrième centre d’Équipe Canada aux Jeux olympiques de 2026 vient de se retrouver dans l’eau chaude.
Pas à cause de ses performances, il sort d’une saison de calibre élite avec près de 90 points, mais à cause d’un nom qui pèse lourd : Macklin Celebrini.
Et c’est Sidney Crosby lui-même qui vient de rebattre les cartes. Interrogé au camp d'orientation de l'équipe canadienne sur les chances de Celebrini de faire l’équipe, Crosby a été cinglant.
« Je pense que c’est un joueur incroyable. Son jeu complet à son âge est impressionnant. Il est engagé défensivement, il compétitionne fort, et son jeu est déjà très mature. Avoir participé au Championnat du monde l’a aidé énormément, je suis certain que ça lui a donné beaucoup de confiance », a déclaré le capitaine des Penguins.
Puis, la phrase qui a changé toute la donne : « Il a gagné le droit d’être dans la conversation. »
Autrement dit, Crosby vient d’ouvrir toute grande la porte à Celebrini. Et pendant qu’il encense le jeune prodige de 18 ans, il n’a pas prononcé un seul mot sur Nick Suzuki.
Ouch. Cruel.
D’un côté, Celebrini récolte des louanges publiques du plus grand capitaine de sa génération, en partie grâce à son choix d’avoir disputé le Championnat du monde.
De l’autre, Suzuki, qui avait décliné les invitations à ce tournoi, ce qui lui avait valu des critiques médiatiques sans précédent, voit aujourd’hui ce refus lui coûter cher.
La situation devient presque ridicule pour Suzuki.
Lui qui devait déjà composer avec l’avantage politique d’Anthony Cirelli (le protégé de John Cooper à Tampa Bay, coach d’Équipe Canada, et de Julien BriseBois, membre du management olympique), doit maintenant faire face à un troisième rival, encore plus menaçant : Celebrini, la coqueluche, le premier choix au total en 2024, le futur visage du hockey canadien.
Et cette fois, c’est Crosby lui-même qui l’a porté au 7e ciel. Quand une légende dit publiquement qu’un joueur « mérite d’être dans la conversation », cela a un poids énorme dans les coulisses de Hockey Canada.
C’est une double gifle pour Suzuki. Non seulement il voit un jeune de 18 ans griller les étapes grâce à une participation au Championnat du monde qu’il avait, lui, refusée, mais en plus, ce jeune reçoit l’appui du capitaine de toute une génération.
Suzuki n’a rien fait de mal. Il est constant, productif, fiable défensivement et déjà un capitaine respecté dans la LNH. Mais l’histoire est cruelle : les projecteurs ne sont pas sur lui. Ils sont sur Cirelli, par loyauté organisationnelle, et sur Celebrini, par engouement national.
Le plus ironique, c’est que Suzuki mérite objectivement sa place. Ses 89 points en font un attaquant de premier plan, et ses responsabilités défensives prouvent qu’il peut tenir un rôle polyvalent.
Mais aux yeux de Hockey Canada, où la politique, la loyauté et les symboles pèsent parfois plus lourd que le mérite, il est en danger.
Nick Suzuki pensait devoir franchir un obstacle. Il en a désormais deux devant lui : le soldat Cirelli et le prodige Celebrini.
Et entre la politique de Tampa et l’appui public de Crosby, le capitaine du Canadien se retrouve dans une situation où, peu importe ce qu’il fait, l’ombre des autres risque de lui voler la vedette.
Ce qui étonne le plus dans la sortie de Sidney Crosby, ce n’est pas tant les compliments qu’il a adressés à Macklin Celebrini, mais bien le fait qu’il n’ait rien dit sur le capitaine du CH.
Pas un mot, pas une allusion, pas même une formule polie pour rappeler que Suzuki est lui aussi dans la conversation pour Équipe Canada.
Ce silence pèse lourd. Parce que Crosby ne parle jamais à la légère. Lorsqu’il encense un joueur, il le fait en conscience, sachant que ses propos auront un impact direct dans la perception de Hockey Canada.
Et c’est là que le malaise grandit. Depuis le début de l’été, le nom de Crosby revient sans cesse dans l’actualité montréalaise, jusqu’à nourrir les fantasmes d’un retour au Québec pour clore sa carrière.
Mais pendant que l’on imagine Crosby en bleu-blanc-rouge, le grand capitaine des Penguins laisse dans l’ombre celui qui détient aujourd’hui le « C » à Montréal.
Pour Suzuki, ce n’est pas seulement un oubli. C’est une mise à l’écart symbolique qui, en pleine lutte pour une place olympique, fait extrêmement mal.
L’absence de mention envers Suzuki rappelle aussi la critique la plus récurrente à son endroit : il n’a pas encore la reconnaissance nationale qu’il mérite.
À Montréal, il est vu comme un pilier, un joueur modèle, un leader silencieux. Mais au Canada anglais, l’impression persiste qu’il n’est pas encore au niveau des McDavid, Crosby, MacKinnon… ni même d’un Cirelli ou, désormais, d’un Celebrini.
Quand Crosby choisit de mettre de l’avant un jeune prodige de 19 ans et qu’il ignore totalement Suzuki, le message est brutal : Nick n’a pas encore percé le plafond symbolique qui sépare les bons capitaines de club des véritables joueurs d’Équipe Canada.
Pour un gars comme Suzuki, qui a porté l’organisation montréalaise à bout de bras depuis trois ans, qui a accepté le rôle de capitaine dans les années les plus sombres de la reconstruction, c’est un coup dur.
On ne peut pas dire qu’il a démérité. Mais voilà qu’il se retrouve invisible aux yeux d’un modèle comme Crosby, et que tout un pays enregistre ce silence comme une preuve que Suzuki ne fait peut-être pas partie des élus.
Au fond, la vraie question est peut-être là : Nick Suzuki et Sidney Crosby sont-ils trop pareils pour cohabiter dans le même vestiaire ?
Les deux partagent le même style de leadership : calme, réfléchi, centré sur le travail et l’exemple. Aucun des deux n’est flamboyant ou bruyant, ils ne cassent pas de bâtons ni ne crient après leurs coéquipiers.
Leur force est justement d’être des capitaines tranquilles, d’imposer le respect sans hausser le ton. Et c’est précisément ce qui pourrait poser problème.
Peut-être que le malaise, au fond, vient de là. Crosby et Suzuki ne sont pas rivaux parce qu’ils sont différents. Ils risquent de l’être justement parce qu’ils se ressemblent trop.
Deux capitaines silencieux, deux leaders intelligents, deux esprits de hockey qui s’imposent naturellement par leur constance. Et dans un vestiaire, il n’y a qu’une place pour ce rôle-là.
Si Crosby débarque à Montréal, l’équilibre pourrait être rompu. Non pas parce que Suzuki n’est pas assez fort pour tenir son rôle, mais parce que leur proximité de style rendrait la hiérarchie floue.
Et dans une équipe jeune qui a mis trois ans à se bâtir une identité autour de Suzuki, ce flou pourrait être dangereux.
Peut-être que le vrai problème n’est pas que Crosby et Suzuki soient différents… mais qu’ils soient trop pareils.
Triste réalité...